La capillarité dans une e-cig : explication et décryptage du phénomène

La capillarité est un phénomène important dans la vaporisation d’un e-liquide. On peut l’expliquer grossièrement par la capacité qu’aura l’e-liquide à remonter dans la mèche lorsque celle-ci sera sèche.  La capillarité est causée par la tension de surface, qui traduit l’aptitude des molécules à rester soudées sur une interface pour ne pas se mélanger avec le fluide extérieur (liquide ou gaz) (figure 1)

Schématisation de l’action des molécules sur une interface

Schématisation de l’action des molécules sur une interface

A l’interface entre un liquide et un gaz (par exemple l’air et l’eau), les différentes forces qui s’exercent entre l’air et l’eau s’équilibrent donc l’eau ne bouge pas. S’il apparaît un déséquilibre des forces, cela engendre un mouvement de l’eau jusqu’à trouver un nouvel équilibre en relation avec la gravité par exemple. Concrètement, en plaçant plusieurs pailles de diamètres différents dans un verre d’eau, nous allons observer une remontée de l’eau dans la paille, qui variera en fonction du diamètre de celle-ci, de la masse volumique du liquide, de la tension de surface….

La capillarité de la mèche va dépendre de sa perméabilité qui est directement reliée à l’agencement des fibres à l’intérieur de la mèche. En effet, une mèche peut être assimilée à un milieu poreux, c’est-à-dire un milieu présentant des interstices par lequel un liquide va pouvoir s’infiltrer, par exemple les sols (roche, sable…), les tissus, les éponges… La perméabilité du milieu va intégrer des propriétés comme l’espace de vide que le milieu contient ou encore la déviation des interstices par rapport à une ligne droite…

La viscosité est aussi un facteur clé dans la capillarité de la mèche. En effet, cette propriété traduit comment « coule » un fluide, c’est-à-dire comment « les couches de liquide » glissent entre elles lorsque ce dernier est soumis à un mouvement. De manière plus concrète, si on compare un e-liquide 100% PG et un e-liquide 100% VG, on observera que le 100% PG coule bien plus facilement, cela car la viscosité du PG est 17 fois plus faible que celle de la VG. 

La capillarité d’une mèche est meilleure si sa perméabilité est grande et la viscosité du liquide faible

L’exemple typique d’une mauvaise capillarité se retrouve dans le phénomène du Dry Hit. En effet, on peut schématiser que la vaporisation du liquide lors d’une inhalation correspond à la consommation d’une partie du liquide contenue dans la mèche. Ceci entraîne un déséquilibre à l’interface et provoque la remontée du liquide contenu dans le réservoir, dans la mèche. Cependant, si le liquide est trop visqueux ou que la perméabilité de la mèche est faible (exemple : usures liées aux répétitions de chauffe), le liquide va remonter lentement. Si les inhalations sont trop rapprochées, la mèche n’aura pas le temps de se ré-imbiber entièrement et chauffera donc à sec, ce qui engendrera des traces noires caractéristiques de la dégradation de la mèche (cercle vicieux) mais aussi libération d’espèces toxiques. D’un point de vue pratique, les résistances en bas de clearomiseur réduisent ce risque, puisque le poids du liquide dans le réservoir permet de garder un apport en liquide plus continu que les résistances en haut de réservoir.

Nous avons réalisé des études sur l’influence de la viscosité des liquides ainsi qu’une comparaison de différents types de mèches. La figure 2 étudie l’influence de la viscosité du liquide selon son taux de PG sur la capillarité.

viscosité

Influence de la viscosité (courbe rouge) sur la vitesse de capillarité (courbe bleue) en fonction de la concentration en PG.

Pour cette expérience, une gamme d’e-liquides a été réalisée avec une proportion de 10% d’éthanol pour simuler la partie aromatique et 90% de mélange PG/VG (en couvrant des taux allant de 100% VG à 100% PG). On peut voir sur la figure 2 qu’une augmentation de la concentration en VG dans le liquide augmente la viscosité (courbe rouge : 100% VG : 470 mPa.s) et diminue nettement la capillarité. En effet on peut observer d’après la courbe bleue que la vitesse de capillarité passe de 1.6 mm/s à 0.35 mm/s en passant d’un liquide composé de 90% de PG et 10 % d’éthanol à un liquide composé de 90% de VG et 10% d’éthanol. La vitesse de capillarité est divisée 5 ! Cependant cette étude ne prend pas en compte l’augmentation de la température du liquide. En effet, lorsqu’un liquide est chauffé, plusieurs de ses propriétés changent : tension de surface, masse volumique, viscosité. Il est important de noter que les différentes expériences ont été réalisées à température ambiante. L’impact du changement de température sur la viscosité et donc la capillarité du liquide sera étudié dans une future publication.

Après avoir étudié, à mèche constante, l’influence de la viscosité des e-liquides et par répercutions la concentration en VG, nous avons conduit des expériences sur l’impact de la mèche en elle-même.

Il existe plusieurs types de mèches sur le marché : la fibre de silice, coton japonais, fibre de cellulose, coton cardé écru ou encore coton de cellulose. Toutes ses mèches ne sont pas construites de la même façon, ce qui implique qu’elles vont posséder des propriétés différentes. Par exemple, la fibre de silice est construite à partir de 3 brins principaux qui s’enroulent les uns autour des autres alors que le coton japonais est constitué de brins unidirectionnels. Ceci entraine que la fibre de silice contient plus de « vide » que le coton japonais qui est beaucoup moins poreux. Cette influence pourra se ressentir sur la montée du liquide ainsi que sur la quantité de liquide qui pourra être contenue dans la mèche.

Sur la figure 3, nous pouvons observer la montée d’un liquide dans 2 types de mèche : coton japonais et fibre de silice. Le liquide utilisé pour l’expérience est composé de 10% d’éthanol pour simuler la partie aromatique et complété avec un mélange 50/50 de PG/VG. L’étude a été réalisée sur des mèches de 1cm, dans le but de se focaliser sur des mèches courtes, tendance actuelle dans les cigarettes électroniques. Nous pouvons extraire deux types d’informations des courbes que la figure 3 : le comportement du liquide dans la mèche aux temps courts et aux temps longs.

Aux temps courts (<10secondes), les deux droites présentent une tendance linéaire qui peut être modélisée par une droite dont la pente traduit la vitesse de capillarité du liquide dans la mèche. L’efficacité est évaluée par la rapidité du liquide à monter dans la mèche. Dans le cas de notre expérience, c’est le coton japonais qui est le plus efficace.

Hauteur du front de liquide en fonction du temps

Hauteur du front de liquide en fonction du temps (Bleu : Coton japonais, Rouge : fibre de silice).

Aux temps longs, la progression du liquide ralentie jusqu’à atteindre une valeur limite. Cette limite traduit un équilibre entre les différentes forces mises en jeu à l’interface du liquide dans la mèche. Le poids du liquide se trouvant en dessous l’empêche de progresser plus haut. Cependant, l’utilisation de mèches supérieures à 1cm se présente rarement, à l’exception des modèles type CE4/5 ou stardust.

Une observation que nous avons pu constater est l’importance du confinement dans la capillarité. En effet, si une mèche en coton japonais est écrasée lors du montage d’un reconstructible, elle sera bien moins efficace que la même mèche n’ayant subit aucun changement. Ceci entraine une diminution de sa capacité à laisser le liquide couler et donc une mauvaise irrigation de la mèche.

En conclusion, nous pouvons sortir les points clés que nous avons pu observer durant notre étude : le taux de VG ne doit pas être trop élevé dans un e-liquide sinon il y a un risque de mauvaise irrigation de la mèche dû à la viscosité importante de la VG. Dans le cas de l’utilisation de reconstructible, il est nécessaire de ne pas trop écraser la mèche et de ne pas trop la déformer pour garder une bonne efficacité.